Lorsqu'ils avaient pénétré dans la pièce et que, sortie bloquée, le plafond hérissé de pics s'était mis à descendre sur eux, Kikue frissonna. Elle était trop jeune pour mourir, et ne s'était pas engagée dans cette grotte froide, longue et angoissante pour mourrir à la première épreuve. Immobile, son cerveau était en pleine ébullition.
Heureusement pour elle, et ceux qu'elle accompagnait, le Seigneur du Nord résolu l'énigme rapidement. Le plafond remonta, et la sortie réapparu.
Les deux seigneurs étaient en pleine compétition d'égo. Comme si c'était le moment. Levant les yeux au ciel, la jeune nièce souffla bruyamment pour signifier aux deux hommes de ranger leurs égos. Une fois dehors, ils pouvaient se battre s'ils le voulaient, mais dehors. Ici, dans ce labyrinthe de cavernes, seigneurs ou pas, ils risquaient tous d'y passer.

Elle passa entre eux et prit la tête de la troupe, sortant de la salle, continuant sur la voie qu'ils avaient momentanément délaissé. Tout ça pour arriver à une nouvelle demi-patte d'oie.
Kikue commençait à en avoir assez de ces embranchements mystérieux à répétition. Il y avait bien une phrase, mais rien à en tirer. Levant une nouvelle fois les yeux au ciel, elle se pinça les lèvres, son regard allant d'une voie à l'autre.
Puis ses jambes prirent la gauche, sans prévenir, ni opinion sur une éventuelle division de la petite troupe. Elle n'était pas naïve, elle savait que son oncle l'empêcherait de s'aventurer dans le couloir seule, ou alors il la suivrait.
Quant au Seigneur Daidoji il fera bien ce qu'il lui sierra.

Comme d’habitude, elle avait foncé dans le tas. Sauf que cette fois-ci avait bien faillit lui couter la vie si elle n’avait pas eut le réflexe de se rattraper avec sa main. Son corps lui paraissait horriblement lourd et elle ne voulait pas lâcher son arme. Son oncle allait arriver, elle n’avait pas longtemps à tenir mais elle se maudissait déjà. Elle voulait faire preuve de maturité et d’aptitude à l’armée, et voilà qu’elle se retrouvait suspendu dans le vide par un bras, pour avoir marché sans prêter attention à ce qu’elle avait devant elle.

« Pfff Sale gourde ! Un aveugle aurait fait mieux. »

Elle força sa respiration à se calmer, mais elle avait l’impression que son cœur allait bondir de sa poitrine. Durant une seconde, elle pensa à ses parents. Peut-être que si elle lâchait, elle pourrait… NON ! Elle était Kikue Mogami, nièce de Jinpachi Mogami. Lâcher était une option à laquelle elle n’aurait même pas du penser.
Une main lui attrapa le poignet, tandis qu’une autre se tendait. Enroulant la chaine de son arme autour de son autre bras, elle leva sa main libre et agrippa le second bras salvateur. Elle fut levée dans les airs, puis reposée sur le sol avant de se faire, légitimement, reprendre. Mais elle écouta à peine, trop occupée à faire tenir ses jambes tendues, genoux verrouillés pour ne pas s’affaler sur le sol retrouvé.
Il y a quelques secondes à peine, elle aurait pu mourir, elle aurait peut-être dû. Mais son nom le lui interdisait.
Que dit-on à la Mort ?

« Pas aujourd’hui »

C’était un souffle à peine audible. Une question que son père lui avait posée alors qu’il partait en campagne. La dernière de sa vie.
Malheureusement, pour l’un des deux soldats resté avec eux, ça avait été aussi le cas. Il gisait avec une flèche dans la tête. Retenant un frisson, Kikue suivit en silence son oncle qui avait déjà fait demi-tour.
Visiblement ce chemin avait été celui des catacombes. Autant rejoindre l’autre seigneur, en espérant

Kikue devait se l’avouer à elle-même, à défaut de l’avouer à quiconque, l’arrivée brutale du serpent géant lui avait fait froid dans le dos. Tout s’était passé si vite. L’autre … guerrier ? Soldat ? était arrivé et avait découpé le monstre en un éclair, avant de réclamer l’amulette que le chef Mogami  tenait dans ses mains. La sortie ou l’amulette en somme. La jeune femme serra les dents. Les choses allaient prendre une tournure plus agressive. Ce que ne tarda pas à lui confirmer le Seigneur du Nord en abattant brusquement son marteau de guerre sur le sol qui se zébra de fissures dans toutes les directions, proférant menaces et autres subtilités à destination des nouveaux arrivants.
*Pour une fois qu’il ne vocifère pas sur les miens… au moins il sert à quelques choses de temps en temps* pensa Kikue, observant la scène d’un point de retrait.

Puis ce fut au tour de son oncle de vociféré. Il était vrai que perdre trois hommes pour un foutu collier avait de quoi échauffer l’esprit d’un homme pour qui la vie de chacun de ses soldats avait de la valeur. Si la jeune adulte n’avait pas encore bien saisit ce que pouvait causer la perte d’hommes que l’on a sous son commandement, elle savait que chaque vie humaine perdue, c’était une vie de gâchée. Une vie perdue à jamais. Partie. Comme ça. Et ça, en revanche, elle ne connaissait que trop bien.
Les provocations allaient bon train, et Kikue observait la scène de façon étrangement stoïque. Jusqu’à ce que l’un des deux hommes se fasse plus menaçant qu’il ne fallait pour réveiller la fibre de la protection familiale.

Bien que stupéfaite par le pouvoir dont faisait preuve Gôki, Kikue fit rapidement tournoyer la chaine de son arme qu’elle envoya sur l’agresseur avec une adresse certes discutable, mais qui atteint en quelques sortes sa cible. Comme quoi, pseudo entrainement sur un pantin immobile plus le stress de la situation, donnaient quelques résultats. Ou alors la chance du débutant.
L'extrémité de la chaine frappa une épaule de l’assaillant et Kikue espéra que cela suffirait à distraire l'homme un bref instant pour... laisser une chance aux deux seigneurs de répliquer peut-être? ou au moins tenter une défense.

« Eh croupion de canard boiteux! Une autre fois. »

Elle... C'te grande gueule. Quelquefois elle se maudissait de ne pas réfléchir avant d'agir. Elle n’avait aucune idée de l’enchainement adéquat. Il pouvait sans doute la tuer d’un battement de cils. Et puis ils étaient deux. Et elle ne comptait même pas pour un demi soldat.
Elle n’était pas dupe. C’était elle qui avait le moins d’entrainement, et rien qu’à son physique, on voyait qu’elle n’avait pas encore la stature d’un véritable soldat.